Maroc : ma vie est formidable

 Salam les gens

Ca y est, on est motorisés. Avec un truc qui peut circuler sur des routes juste en tournant une clé, sans hisser de voiles.

Nous sommes les heureux locataires d’une Picanto.

Alors la question qui vous interroge est mais qu’est ce qu’on a fait de beau? Qu’a-t-on vu de joli?

Euh…. bah pas grand chose. Mais ma vie est formidable.

Parce que vous ne décidez pas comme ça le matin de louer une voiture en imaginant l’avoir dans l’heure qui suit afin de rouler, cheveux au vent (ah ben non il y a un toit sur ces trucs – euh pour mes ex collègues, je me souviens que toit se dit pavillon en langage auto, je dis toit juste pour faire genre, voyez?) en direction d’Essaouira…

Ce matin, remplis d’allégresse, nous sommes, à 10h (=horaires d’ouverture de l’agence et pas nous qui sommes feignasses hein?) au téléphone avec le gérant de l’agence.

«Je voudrais louer une voiture pour 3 jours à partir d’aujourd’hui, en avez vous et à quel prix?» lui demande le capitaine, trop sur de la réponse immédiatement positive qui eut du s’en suivre (car basse saison=peu de touristes pour louer la picanto, faut tout vous expliquer!)

«D’accord. On a une Picanto à 23 euros/jours, dispo aujourd’hui».

«23 euros? Il est dit 21 sur votre site» (ouais on est malin nous la Namasté team, va pas nous la faire le gars…)

«……»

Le capitaine répète des fois que Maroc télécom ait coupé la ligne….

«23 euros? Ou avez vous vu ça?»

Bis repetitat placent (A défaut d’arabe je cause latin. Je vous l’accorde, c’est moins utile.)

«Sur votre site».

«Bon d’accord si tu veux 21 euros (Bah oui on veut). Quand tu la veux?»

«Maintenant, à la marina».

«Oui d’accord». La victoire est proche, Xavier se voit déjà sur le podium.

«Alors RDV dans 10 mn à la capitainerie?»

«Euh, 14 h à la marina».

«Ah, ah, ah». Ca c’est moi qui me marre. Je joue pas collectif.

 

C’est à ce moment là que Xavier et moi nous souvenons en choeur que le mot «maintenant» n’a pas de traduction en arabe. Par contre on avait rapidement appris le mot demain (boukra) au Liban, leitmotiv du mécano Volvo si peu pressé de mettre le nez dans nos moteurs….

 

«Donc la voiture n’est pas disponible tout de suite?» (toujours reformuler, ça facilite le débat).

«Si si, à 14 h»….

 

OK, mieux vaut descendre du podium et lâcher  l’affaire.

Reconnaître ses limites est une qualité, comme la patience.

Notre vie est formidable, on passe des coups de fil formidables.

 

14h : on file à la capitainerie avec un bouquin de 900 pages chacun qui nous aidera à passer le temps.

Lucidité est mon second prénom.

Notre vie est formidable, on lit des livres formidables.

 

14h15 : premier coup de fil du loueur

«Ou es-tu?» qu’il balance à Xavier.

Alors non seulement l’espace temps est différent mais l’espace tout court aussi.

Mais dans quelle dimension sommes nous? La 14ème???

«Ben à la capitainerie, là où nous avons RDV»

«Euh???»

« La capitainerie, le bureau de la marina, les douanes….»

«Oui oui je sais où c’est…je suis à l’entrée de la marina (qui est à 200 m de la capitainerie), j’arrive».

Le podium est à portée, la ligne d’arrivée est toute proche.

Naïveté est mon troisième prénom.

 

14h30 : deuxième coup de fil.

«Ou es-tu?» qu’il balance à Xavier.

«Ben toujours à la capitainerie (en train de parier avec les copains à quelle page des 900 on sera rendu quand tu arriveras) »

«euh????»

« La capitainerie est au bout de la jetée, près de la tour visible depuis l’entrée»

«Oui oui je sais où c’est,  je suis à l’entrée de la marina , j’arrive».

Ce coup-ci, c’est sur, il arrive, pour de vrai.

Finalement notre vie est ultra formidable.

 

14h45 : troisième coup de fil.

«Ou es-tu?»

«Ben toujours à la capitainerie ( en train de se demander si, finalement, c’est pas une caméra cachée)».

Xavier répète les instructions pour arriver de l’entrée de la marina jusqu’à nous, soit, suivre la seule route.

«Oui oui je sais où c’est, je suis à l’entrée de la marina j’arrive».

A cet instant, le podium a disparu. La ligne d’arrivée aussi.

Les paris nous donnant rendus à la 853eme page de notre bouquin à l’arrivée du loueur sont à deux contre un.

L’instant est grave.

 

15h : il est là. Je pince Xavier pour être sure de ne pas rêver. Il hurle (petite nature, mérite pas le podium). Je reste formidable.

 

Les papiers sont faits rapidement.

Vers 15h15, le loueur nous demande de le ramener à son bureau.

16h, Hamdoullah, on a une voiture et on peut commencer la journée….

enfin après avoir rempli le réservoir laissé sur la réserve… Entre  les tours de piste à la marina et le retour à son bureau, on est à sec…

 

Nous décidons de faire un gros ravitaillement au supermarché Marjane situé en banlieue.

Arrivés à hauteur de Marjane, Xavier continue sa route au lieu de s’arrêter.

Hein?

Il veut aller à un super magasin de pêche dans le bled voisin. Et je vous jure que je n’invente rien.

Je m’interroge : Xavier est-il de mèche avec le loueur pour me faire perdre la raison?

A ce stade de mes réflexions, je crois à 90% que la réponse est oui.

Cependant ma vie est formidable, je visite des tas de magasins de pêche formidables.

 

17h : on s’amarre sur le parking de Marjane.

Je dois être dans un rêve.

Ma vie est formidable, je vais, 7 heures après ma requête d’un véhicule auprès du loueur, faire ce pour quoi j’avais besoin d’une voiture aujourd’hui : les courses.

 

20h : les courses sont à bord.

On range.

 

Le temps de poser mes fesses dans le carré, Xavier me rappelle que j’ai du poisson à cuisiner.

Ah oui, j’avais oublié de vous dire : hier il a pêché 7 mulets (entre 500g et 1 kg chacun), pas un de moins. Pourquoi 7? Parce qu’il commençait à fatiguer, sinon il aurait bien continué…. Il est pas formidable le capitaine?

 

Oui, les mulets aussi sont formidables, presque autant que moi.

Et encore je ne vous ai pas parlé :

  • de la laverie, dernier salon où je cause avec les policiers de leurs problèmes avec les chats qui dorment sur les tapis de prières et les salissent, ce qui est très embêtant car faire la prière permet de devenir un meilleur homme, le tout alors que je débranchais leur voiturette d’intervention afin de brancher la machine à laver…. (promis je vous montrerai une photo de la voiturette branchée à côté de la machine à laver)
  • des américaines à moitié nues qui s’agitaient comme des pégasses en faisant de grands signes aux policiers (ceux qui ont des problèmes avec les chats) alors que je manquais en mourir de honte pour elles tout en essayant de trouver un trou de souris pour me cacher…
  • de l’artisan qui nous a emmené 10 fois des échantillons de maillons de chaîne sensés être identiques à ceux de notre chaîne de mouillage et pourtant à chaque fois différents…

 

Et dire que demain ça recommence….

 

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